Réglages expérimentaux
Acquisition : optimisation de l’instrumentation et des paramètres expérimentaux
- Pour obtenir des données RMN de bonne qualité exploitable, il est indispensable de bien choisir et optimiser plusieurs aspects techniques :
- Echantillonnage
- Choix de la tête de mesure en fonction du signal à acquérir ; accord et adaptation de la tête de mesure choisie
- Procédure de « lock » ou verrouillage champ-fréquence pour assurer la stabilité temporelle de B0 au cours des acquisitions
- Réglage de l’homogénéité de champ magnétique sur l’échantillon étudié : « Shim »
- Optimisation des délais de la séquence RMN choisie (AQ, D1) et des paramètres spectraux (TD, SW, O1)
- Calibration des impulsions radiofréquence utilisées lors de l’acquisition
- Une fois les réglages et les paramètres expérimentaux optimisés, l’acquisition est réalisée dans les meilleures conditions. Le signal ainsi obtenu peut être traité : il faut passer à l’étape d’ajustement des paramètres de traitement des données (ou processing) du signal RMN acquis (Zero filling, Apodisation, phasage si possible).
Echantillonnage
En fonction de l’état physique du soluté et des informations RMN que l'on souhaite recueillir, il est nécessaire de bien penser l’échantillonnage. En effet, la dynamique du soluté n’est pas la même dans un solvant visqueux ou non, ou bien les vitesses d’échange chimique sont différentes dans un solvant protique ou aprotique.
Lorsque l’échantillon est liquide ou cristal-liquide, le contenant adéquat est en général un tube de 20 cm de long et de diamètre extérieur (o.d) de 5 mm standard. Le choix du diamètre du tube peut varier de 1 à 15 mm en fonction de la quantité de soluté disponible sachant que le volume d’analyse est fixe, et le type de noyau excité. La qualité du tube (qualité du verre, parallélisme et épaisseur des parois du tube) doit être adaptée à l’amplitude du champ magnétique de l’aimant de manière à ne pas être l’élément limitant de la procédure de réglage d’homogénéité. Egalement la bonne tenue à des fortes variations de température et de pression doit être envisagée le cas échéant. Il est recommandé de ne pas rayer les parois du tube ni de le chauffer lors de la phase de nettoyage : un dispositif adéquat existe pour procéder au nettoyage. Les rotors supports des tubes doivent aussi être adaptés en fonction de la température (céramique pour haute et basse température, ou PTFE en routine).
Des rotors en zircone plutôt que des tubes en verre sont utilisés pour l’échantillonnage solide.
Accord et adaptation d’une tête de mesures RMN
- Pour optimiser l’émission-réception d’un signal donné, le circuit {L, C1, C2} doit être accordé en fréquence à ν ≈ νr : « Tuning » en modifiant la valeur de C2. Il doit aussi être adapté en impédance de manière à ce que le circuit soit purement résistif en modifiant la valeur de C1 : « Matching »
- Pour modifier la valeur d’une capacité, il suffit de modifier l’espacement des deux plaques qui constituent le condensateur. Des mollettes ou barrettes définies « T » et « M » sont positionnées sur la sonde de mesure pour ces étapes de « Tuning » et « Matching »
- Ces étapes doivent être renouvelées dès l’introduction d‘un nouvel échantillon ou lors de la modification de grandeurs expérimentales telle que la température par exemple.
Dans la fenêtre « d’accord et d’adaptation » de la sonde de mesure, l’abscisse permet d’ajuster l’accord en fréquence ou « Tuning », et l’ordonnée permet d’ajuster l’adaptation en impédance ou « Matching ». La courbe réponse du circuit-réponse RLC de la bobine d’émission –réception du noyau considéré est présentée en gris.
- Réglage du « Tuning » : Le minimum de cette courbe doit coïncider en abscisse à la fréquence de Larmor du noyau considéré, symbolisée par la ligne verticale rose pour avoir de bonnes conditions d’accord en fréquence, indépendamment de sa position en ordonnée.
- Réglage du « Matching » : Le minimum de cette courbe doit coïncider avec une valeur nulle en ordonnée pour avoir de bonnes conditions d’adaptation en impédance, indépendamment de sa position en abscisse.
Stabilité temporelle du champ B0 : verrouillage champ-fréquence ou signal de « lock »
Afin d’assurer la stabilité temporelle du champ magnétique B0, une boucle d’asservissement électronique (accordée sur la fréquence d’un spin autre que celui étudié) est installée sur le spectromètre. Le plus souvent, le circuit de « lock » est accordé sur la fréquence du deutérium. Cela nécessite d’introduire des noyaux deutérium dans l’échantillon, généralement en utilisant un solvant d’échantillonnage deutéré chimiquement compatible avec le composé d’intérêt (« lock interne »). S’il est impossible de polluer l’échantillon, un « lock externe » sera privilégié en utilisant deux tubes RMN concentriques par exemple, l’un contenant le composé d’intérêt en solution dans un solvant adéquat, l’autre contenant le composé utile à la procédure de « lock ».
Si le champ magnétique B0 a varié entre deux points d’expérience, la fréquence de résonance du noyau-espion utilisé pour le « lock » aura varié comme celle du noyau excité. Elle sera recalée à sa valeur nominale par la boucle d’asservissement électronique avant de poursuivre l’acquisition du signal du noyau excité.
Homogénéité du champ B0 perçu par tous les spins de l’échantillon : procédure de « shims »
Le spectromètre RMN est équipé d’un aimant de champ magnétique parfaitement homogène sur toute la zone d’acquisition. Pour y parvenir, un ensemble de « bobines de shims froids» a été installé dans l’aimant supraconducteur. Ces bobines sont inaccessibles à l’utilisateur.
Lorsqu’un échantillon RMN est introduit dans l’aimant, la qualité du tube RMN, comme la nature des composants de l’échantillon (soluté étudié, solvant, impuretés, etc.) affectent localement le parallélisme des lignes de champ magnétique B0. Afin de palier ces inhomogénéités locales, l’aimant est équipé d’un « canon de shims » concentrique qui contient un ensemble de « bobines de shims à température ambiante » dont l’intensité électrique qui les parcourt est réglable par l’utilisateur. Ainsi localement, des petits champs magnétiques générés par ces bobines de « shims » et contrôlés par l’utilisateur vont permettre de ré-obtenir la plus parfaite homogénéité de champ magnétique possible en présence de l’échantillon introduit dans l’aimant.
En général, plus l’intensité du champ magnétique est élevée et plus il est difficile d’obtenir une parfaite homogénéité de champ magnétique. Il existe néanmoins maintenant des procédures automatisées plus ou moins efficaces qui permettent de réaliser l’étape de « shimming ». Certaines cartographient les lignes de champ magnétiques avant et après introduction de l’échantillon pour parvenir au résultat escompté (« Topshim », « gradshim »).
Accumulation de signaux RMN : délai minimal de répétition
Pour être quantitatif, l’ensemble des systèmes de spins doit avoir relaxé avant de pouvoir passer à une nouvelle accumulation du signal. Le signal maximal est obtenu pour un angle d’impulsion de 90° mais nécessite d’attendre au moins 5 fois la valeur T1 du spin le plus lent à relaxer, ce qui peut être chronophage et incompatible avec un temps d’expérience. Il est donc nécessaire de trouver un bon compromis entre le temps d’attente entre chaque accumulation du signal, le nombre NS d’accumulations pour un rapport S/B compatible avec une mesure d’intégrale des signaux de bonne qualité et l’angle d’impulsion appliqué, comme indiqué dans la figure suivante.
- L’angle de Ernst θErnst (Prix Nobel de Chimie 1991) est le meilleur compromis entre une valeur de T1 donnée et le temps d’attente AQ+RD pour une accumulation donnée.
- Ainsi θErnst est tel que
- Exemple : pour des valeurs de T1 de 3 s, et AQ+RD de 3 s, l’angle de Ernst égale 68°
Acquisition numérique et transformation de Fourier digitale
Le signal RMN est analogique puisqu'il s’agit du signal réponse de l’échantillon perturbé par une onde radiofréquence polychromatique. Pour en faciliter le traitement, ce signal analogique est habituellement numérisé à l’aide d’un Convertisseur Analogique Numérique (CAN). L’échantillonnage du signal analogique en signal numérique ne lui est fidèle que s’il suit le théorème de Shannon-Nyquist. Ainsi la fréquence d’échantillonnage du signal analogique doit être au moins double de la fréquence de résonance la plus haute du système de spins étudié.
En pratique, AQ est définie empiriquement de manière à ce que le FID atteigne un rapport S/B (quasi)-nul : AQ ne dépend que des interactions RMN qui régissent la relaxation du système de spins. Ce FID analogique est échantillonné par TD (Time Domain) points de manière à respecter le théorème de Shannon-Nyquist. RD est fixé en fonction de l’angle de Ernst choisi (PW), ainsi que NS en ayant estimé la valeur limitante de T1. Après transformation de Fourier, le spectre RMN obtenu a une largeur spectrale SW centrée sur la valeur O1. SW et O1 doivent être optimisées empiriquement compte-tenu des fonctions chimiques présentes sur la molécule ou système de spins étudié.
L’algorithme de Cooley-Tuckey permettant de réaliser une transformation de Fourier rapide (FFT) n’est utilisable que si le nombre de points impliqués dans la transformation est une puissance de 2. Cette condition suppose en général de réaliser la FFT non pas sur TD points mais sur SI (Size) points=2N >TD
Calibration d’une impulsion radiofréquence
Lors d’une expérience RMN mono- ou multi-impulsionnelle, il est nécessaire de contrôler et caractériser parfaitement les excitations que subissent les noyaux étudiés.
Dans certaines séquences multi-impulsionnelles, les valeurs des angles de basculement associées aux impulsions d’excitation sont bien définies pour obtenir le résultat escompté.
Même dans la séquence mono-impulsionnelle, le nombre d’accumulations du signal dépend intimement de l’angle d’impulsion choisi en fonction des propriétés de relaxation du système de spins étudiés.
Dans tous les cas, il est donc indispensable de calibrer les impulsions utilisées.
Une impulsion radiofréquence correspond à une certaine énergie électrique caractérisée par sa puissance électrique ou son atténuation en dB, appliquée au système pendant une durée PW. Les impulsions usuelles sont polychromatiques, elles vont exciter de manière homogène l’ensemble des fréquences de résonance du système de spins simultanément, afin que tous comment à relaxer de manière concomitante. La calibration de ces impulsions « broadband » requiert en général de fixer la puissance électrique et de faire varier PW.
Lors de la calibration des impulsions « band-selective » ou sélectives, la fenêtre spectrale à exciter est fixée, ce qui définit la durée temporelle PW de l’impulsion. La calibration consiste alors à définir la puissance électrique qui correspond à l’angle de basculement souhaité.